[20] ‘Artist’s Language 1’, Art-Language, New Series No. 3, September, 1999, pp. 36-46 (p. 32).
Quels que soient nos efforts pour théoriser la relation entre le verbal et le visuel, il se trouve que la pratique artistique récente nous présente des cas spécifiques dans lesquels nous sommes incapables de distinguer, dans un but critique, entre la lecture d’un texte et la saisie d’un détail décoratif.
En 1997, vingt-cinq ans après avoir exposé le premier Index, Art & Language est retourné à Kassel pour la Documenta X. À cette occasion, il y avait deux grandes salles à remplir. L’œuvre se fondait sur des unités de taille et d’aspect identiques. Sur chacune des 436 petites toiles, l’image d’un livre ouvert était disposée dans un espace apparemment peu profond mais donnant l’illusion de trois dimensions. Chaque toile avait droit à une couleur unique, dont le ton variait en fonction de l’ombre au milieu du livre et sur le fond. Chacune montrait une partie différente de texte imprimé. La plupart des textes avaient été écrits par Art & Language. Certains provenaient de textes pornographiques transformés par Art & Language à l’aide de la technique du malapropisme, à propos duquel on pourra lire l’article « Artist’s Language 2 » dans Art-Language, nouvelle série, Numéro 3. Les textes variaient en lisibilité en fonction de la densité du ton, du degré de contraste avec les caractères et de l’étendue du milieu ombré du livre ouvert. Dans une des salles de la Documenta, quelque 244 de ces panneaux étaient disposés sous la forme de mobilier domestique: une table de déjeuner et des chaises, un canapé et deux fauteuils. Alors que certains textes pouvaient aisément être lus dans ces circonstances, d’autres demandaient aux spectateurs quelques efforts physiques pour les sortir du seul statut de panneaux décoratifs. Dans la seconde salle, 192 panneaux étaient disposés horizontalement dans 12 vitrines formant un grand carré. Un spectateur se tenant devant un des bords pouvait facilement lire les textes de la plus proche des rangées de panneaux, si le contraste le permettait. La rangée suivante était plus difficile à lire, la troisième très difficile et ainsi de suite. À mesure que chaque texte sombrait dans l’illisibilité, le spectateur était invité à s’abandonner aux propriétés décoratives de l’ensemble. À l’endroit le plus éloigné du spectateur, les panneaux formaient un damier brillamment coloré longeant le bord du grand carré.
[20] ‘Artist’s Language 1’, Art-Language, New Series No. 3, September, 1999, pp. 36-46 (p. 32).
However we may theorise the relationship between the verbal and the visual, it happens that the recent practice of art presents us with specific cases in which we are unable to distinguish for the purposes of criticism between the reading of text and the recovery of decorative detail.
In 1997, twenty-five years after the first Index was shown, Art & Language
returned to Kassel for Documenta X. On this occasion there were two large
rooms to be filled. The work was based on units of identical size and type.
In each of 436 small canvases, the image of an open book was set within an
apparently shallow illusionistic space. Each canvas was given a single colour,
its tone varying only in accordance with the shadowed centre of the book and
its surrounding. Each showed a different spread of printed text. The majority
of the texts were writings by Art & Language. Some were based on pornographic
texts transformed by Art & Language through the device of malapropism,
on which see the paper ‘Artist’s Language 2’ in this issue. The texts varied
in legibility according to the depth of tone, the degree of contrast with
the type, and the extent of loss in the shadowed gulley of the open book.
In one room at Documenta some 244 of these panels were arranged into the forms
of domestic furniture: a table with dining chairs, a sofa and two armchairs.
While some of the texts could be easily read under the circumstances, others
required some degree of physical exertion from the spectator if they were
not to be reduced to the mere status of decorative panels. In the second room
192 panels were set horizontally into 12 vitrines composing a large square.
A spectator standing at one edge of the square could easily read the text
on the nearest row of panels, contrast permitting. The next row was harder
to read, the third row very difficult and so on. As the individual texts shaded
into illegibility so the spectator was invited to surrender to the decorative
properties of the whole. At the spectator’s furthest horizon the panels formed
a brightly coloured chequered border.